Montréal, le 3 avril 2019. Le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) est amèrement déçu du projet de loi 16 déposé aujourd’hui par la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest. « Nous réclamons une réforme complète de la Régie du logement afin de rendre le tribunal juste et accessible pour les locataires. Or, le projet de loi 16 propose des modifications techniques au fonctionnement interne du tribunal qui ne s’attaqueront pas aux nombreuses injustices vécues par les locataires. La ministre décide de prioriser des mesures cosmétiques comme de changer le nom de la Régie pour le Tribunal administratif du logement plutôt que de revoir de fond en comble le tribunal », déplore le porte-parole du RCLALQ, Maxime Roy-Allard.
Des mesures inquiétantes et un manque d’ambition
Le projet de loi 16 manque cruellement d’ambition en ne s’attaquant pas aux grandes injustices subies par les locataires à la Régie du logement. Rien n’est proposé pour faire cesser les expulsions de locataires à la chaine pour cause de non-paiement de loyer et pour améliorer l’accès à la justice. « Il est urgent d’instaurer un contrôle obligatoire des loyers et de favoriser des ententes de paiement pour limiter les expulsions de locataires. Le tribunal doit non seulement mieux protéger les locataires, mais aussi favoriser l’accès à la justice en réduisant significativement les délais et en ouvrant des points de service dans toutes les régions du Québec », réclame M. Roy-Allard.
Le RCLALQ soulève plusieurs mesures inquiétantes qui se retrouvent dans le projet de loi 16, comme l’utilisation plus répandue de la conciliation. « Le RCLALQ verrait d’un bon œil l’usage de la conciliation pour les causes en non-paiement de loyer pour ainsi favoriser les ententes de paiement et le maintien des locataires dans leur logement. Or, le projet de loi ne semble pas se préoccuper des milliers de locataires qui sont expulséEs chaque année pour cause de non-paiement sans pouvoir expliquer leur motif ou sans se faire donner l’opportunité de rembourser leur dette tout en conservant leur logis », déplore Maxime Roy-Allard. Le RCLALQ dénonce également la volonté de la ministre de faire davantage utilisation de la visioconférence puisque ce moyen technologique peut complexifier davantage les audiences et nuire à l’assistance des juges envers les locataires.
Le projet de loi vient également complexifier plusieurs éléments de procédures, notamment le délai de dépôt des preuves, l’instauration de conférence de gestion et de procédures sur dossier. Ces nouveautés, qui faciliteront sans doute le travail des avocatEs, auront pour conséquences de compliquer la compréhension des procédures pour les locataires qui se représentent seulEs.
Des mesures positives
Le RCLALQ tient à souligner la récente hausse du budget de la Régie du logement, soit une augmentation de 5 millions $ par année, ce qui représente environ 20% du budget annuel du tribunal. La ministre Laforest a précisé en point de presse comment seront utilisées ces sommes : 9 nouveaux juges et 30 nouveaux préposés à l’information seront embauchés. Le RCLALQ espère néanmoins que cette annonce favorisera l’accès à la justice pour les locataires de plusieurs manières, notamment en réduisant les délais d’attente, mais aussi en augmentant le nombre de bureaux dans les différentes régions, en éliminant les frais d’ouverture de dossier et en améliorant le service d’information.
Le projet de loi propose aussi quelques modifications intéressantes pour les locataires et l’accès à la justice.
- L’assistance aux parties par des tiers de confiance lorsque l’âge ou l’état de santé le requiert. Bien qu’il s’agisse d’une avancée pour la défense des droits des personnes plus vulnérables, le RCLALQ aimerait voir cette possibilité étendue à toutes les parties non représentées.
- Les rapports de médecins, polices, pompiers et d’inspecteurs municipaux pourront tenir lieu de témoignage. Cette modification devrait permettre de limiter les remises d’audience et d’accélérer le traitement des dossiers où la santé et la sécurité des locataires sont concernées.
- Le resserrement des procédures dans les dossiers de fixation de loyer. Actuellement, la Régie est très laxiste envers les propriétaires qui ne remettent pas à temps les documents nécessaires (formulaire RN) pour procéder à une fixation de loyer. Le RCLALQ accueille favorablement la modification visant à fermer tout dossier en fixation de loyer lorsque le propriétaire n’a pas transmis la documentation nécessaire dans les délais prescrits par la loi.
Le RCLALQ tiendra une conférence de presse demain matin le 4 avril à 11h en compagnie d’organisations alliées pour interpeller la ministre Andrée Laforest.